Rencontres

Fabrice Bana

Comment avez-vous rencontré Collection Latil ?

Nous nous sommes rencontrés à travers Tai Ping lorsque je travaillais chez Veere Grenney et Anne-Sophie chez Cogolin. Nous avons fait quelques projets ensemble. Au fil du temps, nous sommes devenus amis.

Comment votre parcours vous a-t-il mené à l’architecture d’intérieur ?

J’ai changé de carrière car, initialement, j’étais professeur de français en Angleterre. Il y a environ dix ans, j’ai voulu changer de carrière. Je me sentais créatif et j’avais envie de découvrir ce monde qui m’était inconnu. À l’âge de 30 ans, je me suis dit que c’était le bon moment pour changer de parcours. J’ai arrêté l’enseignement et je suis retourné étudier mais cette fois à la KLC School of Design à Chelsea. J’ai fini l’année avec le best student award et le highest achievement award. En plus de mes études, je travaillais deux jours par semaine un étage en dessous au showroom Tissus d’Helene d’Helen Cormack qui m’a beaucoup appris, moi qui n’y connaissais rien à la décoration. Les plus grands décorateurs y passent régulièrement et cela a été une chance incroyable qui m’a tiré vers le haut. À la fin de mon année d’étude, un peu par coïncidence, Veere Grenney, qui avait sa collection de tissus chez Helen, a appris que je cherchais du travail et lui cherchait un junior designer pour un beau projet. C’est comme cela que je suis rentré dans le monde de l’architecture d’intérieur. « At the right place at the right time » comme on dit.

Vous êtes président du Paris Déco Off cet année, quelle est l’importance de cet événement dans le monde du design ?

Cela va faire plusieurs années que je vais au Paris Déco Off. Il y a cinq ans, j’ai créé mon blog qui s’appelle « A-Gent of Style » et qui a commencé à se faire connaître. En France, ils ont entendu parler de mon blog qui se focalise surtout sur ce qui est haut de gamme et le Paris Déco Off m’a invité à être l’un des juges et, depuis, chaque année en janvier c’est un moment important et un rendez-vous immanquable. Créateurs et éditeurs, experts et journalistes, blogueurs mais aussi fournisseurs et designers, se retrouvent pour l’occasion. C’est le moment pour créer des liens. On y découvre les dernières collaborations, les petits nouveaux, les installations, les pop-ups et tant d’autres choses. C’est un moment pour s’émerveiller, pour apprendre et pour célébrer tout cela dans un dynamisme et une joie qui nous sortent de la grisaille parisienne. Se balader autour de Saint-Germain au fil des belles boutiques, ce n’est pas si mal ! Cette année, c’est le dixième anniversaire du Paris Déco Off donc une belle année. Je suis très honoré qu’on m’ait demandé d’être président car c’est un moment incontournable et convivial. Il offre une grande visibilité de la scène de la déco française et qui a même une portée internationale. J’ai hâte de retrouver tout cela. J’ai hâte de revoir tous ces abat-jours à taille géante iconiques eux aussi fidèles au rendez-vous.

Quel est le cadre de votre collaboration avec la maison Lalique ?

Je connaissais Lalique pour ses pièces antiques et vintage parce que je m’en occupais chez Veere Grenney. J’allais souvent aux enchères ou voir les dealers d’antiques et forcément, j’ai été amené à voir des pièces Lalique d’origine. Après avoir quitté Veere Grenney, avec le blog que j’ai créé, j’ai été amené à écrire plusieurs articles sur Lalique. Ils m’ont repéré, nous nous sommes rencontrés et appréciés. J’ai écrit quelques articles pour eux, notamment un article sur leur collaboration avec Damien Hirst. L’année dernière, ils m’ont invité à interviewer le grand décorateur français Pierre-Yves Rochon au Salone del Mobile de Milan pour discuter de sa nouvelle collection de meubles faite en exclusivité pour Lalique devant un groupe de designers spécialement invités pour cet événement. J’ai eu la chance aussi d’être invité au musée, à l’usine et au château Lalique à Wingen-sur-Mer. Ce fut une expérience incroyable. À deux occasions, Christie’s m’a demandé de créer un espace chez eux en utilisant des pièces incluses dans des ventes imminentes et à chaque fois, j’y ai incorporé des pièces nouvelles de Lalique qu’ils ont eu la générosité de me prêter. C’est une belle collaboration voire même une amitié. Cette année au Paris Déco Off, Lalique présente à la Pagoda (VIIIe arrondissement) leur nouvelle collection et des pièces exceptionnelles de l’artiste et designer Arik Levy. À ne pas manquer!

Pouvez-vous nous parler de votre collaboration avec Maison Leleu  ?

Encore une fois, une belle rencontre un peu par hasard. L’année dernière à l’Hôtel Bel ami avec l’équipe du Paris Déco Off au déjeuner de délibération entre juges, je vois sur les murs trois tapis qui m’interpellent. Je m’approche et je me dis que ce doit être des tapis Leleu. J’ai pu les reconnaître grâce à mon poste de responsable des antiques chez Veere Grenney car j’ai été amené à voir des tapis et des meubles Leleu d’origine. Ces tapis m’intriguaient alors on m’a présenté Alexia Leleu. Je savais que les tapis Leleu d’origine sont des années 40, 50 60 mais que la Maison a arrêté la production en 1973. Alexia Leleu, cinquante ans plus tard, a ressuscité l’affaire familiale qui était endormie. Comme une résurrection dans un sens. Lors de notre première rencontre, elle m’a dit qu’elle faisait de nouvelles reproductions des tapis de sa grand-mère, Paule Leleu. C’est un grand plaisir pour moi de la représenter à Londres. On a fait un projet qui devrait aboutir au début du printemps. Il y a aussi d’autres collaborations qui vont se mettre en place. Aujourd’hui, Maison Leleu redonne naissance à un héritage incroyable de savoir-faire et d’expertise. Pour l’instant, Alexia Leleu en est à sa deuxième collection de tapis, elle va ressortir des papiers peints, des tissus et puis après les luminaires, et enfin les meubles Leleu. Tout cela m’exalte.

Chaque pièce a-t-elle une histoire ?

Tout à fait, moi j’aime beaucoup tout ce qui est du XXe siècle ; c’est ce qui me passionne le plus. Tout a une histoire car derrière un objet il y a une création, un artiste, un atelier, une provenance, des acheteurs, des ventes aux enchères, une affaire familiale ou commerciale. C’est aussi intéressant de voir les objets disparaître pour refaire surface quelques années plus tard. C’est un peu comme Leleu qui a disparu pour renaître de ses cendres en quelque sorte. Tout cela donne de la vie à l’objet. Ce n’est pas juste un tapis ou un meuble qui est là, une pièce statique. Ceux qui achètent ces antiques vivent avec eux, il faut les intégrer dans une maison qui ne doit pas se transformer en musée. Même s’il y a des tâches, des imperfections cela donne de la vie à la pièce, comme la patine, une belle usure, cela ne reste pas enfermé dans un musée ou dans une vitrine. Intégrer une telle pièce c’est toujours passionnant car il y a une forme, une période, un style, bien sûr des couleurs, de la texture. Cela donne une vivacité et une dynamique à l’objet.

Blog ou instagram?

Les deux ! Cependant, je dois avouer que les blogs sont de moins en moins en vogue. Il y a cinq ans, on ne parlait que des blogs, cela faisait partie de la vie. Je sais que les gens lisaient mon blog car j’y mettais une vraie étude et une recherche. Les choses viennent et puis s’estompent. Les gens veulent de moins en moins lire, parfois simplement car ils n’ont pas le temps, je pense. Tout ce qui est basé sur l’image, instagram par exemple, a pris la relève. Je sais que tout le monde maintenant est passé à Instagram, je ne sais pas pourquoi mais c’est un fait. Peut-être que lire un blog sur smartphone n’est pas toujours évident alors que l’on peut ouvrir Instagram partout et que les images nous attirent avec leurs quelques mots de descriptions. Je dois dire que j’adore Instagram et que je suis une victime de son succès.

Quels sont vos projets pour le futur?

Pendant trois ans j’ai été consultant sur un projet de boutique hôtel qui se trouve sur l’île de Islay sur la côte Ouest de l’Écosse. C’est un hôtel de destination que l’on a refait. J’étais en charge de la décoration. Il a ouvert en septembre et s’appelle The Machrie. Ce fut un projet très intéressant car c’était mon premier projet pour du commercial et non du résidentiel. Je pense avoir beaucoup appris et c’était une très belle expérience. Pour le futur proche, j’espère me rendre au Salone de Milan et j’ai aussi un projet résidentiel en tant que consultant.

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